Présenté par Roland Meige

Le pérégrin émerveillé
de Jean-Louis Gouraud,
Actes Sud. 2012
ISBN : 978-2-7427-9711-0
Ah ! que voilà un ouvrage qui fait du bien ! Plein de joie de vivre, de bonne humeur, et d’humour. Quelque peu las des essais en géopolitique de spécialistes hantant les plateaux TV, de textes post-thèses de vieux universitaires qui remâchent leurs travaux en se citant parmi, et de la morosité ambiante, j’ai ouvert ce fort bouquin, où le cheval est roi.
Oui, gros livre, 517 pages, mais ce n’est pas un pavé sur lequel on se casse les dents, mais un savoureux mille-feuille fondant sous le palais.
L’auteur, personnalité française qui semble avoir eu mille vies, est membre du Conseil d’Administration de la Société de Géographie. Note aux amis genevois béotiens : « Société de Géographie » tout court, pas besoin d’ajouter « de Paris ». C’est la plus ancienne au monde, fondée en 1821, la Mère des Sociétés de Géographie, donc. Ne demandez pas à Jean-Louis Gouraud s’il connait untel, demandez-lui plutôt ceux qui il ne connaitrait pas. Mais ne lui demandez pas, non plus, s’il est le petit-fils du Général Gouraud (1887-1946), qui fut « l’exécuteur » in situ du Traité Sikes-Picot au Proche-Orient. Non, ce qu’il connaît, de l’Orient, ce sont ses chevaux, et ses cavaliers.
Le fil conducteur de cet ouvrage, c’est le voyage qu’il a fait, à cheval, en 1990 de Paris à Moscou, avec don de ses chevaux à Mikhaïl Gorbatchev à l’arrivée. Départ un Premier Mai, arrivée un 14 Juillet.
Jean-Louis Gouraud est grand spécialiste de l’univers du cheval, il a écrit de nombreux ouvrages, connaît toutes les races, tous les haras, tous les maquignons – et quelques accortes palefrenières…Et, pour le profane total dont je suis, on apprend énormément à le lire. Je lui ai dit ma méconnaissance de ces bestiaux, voire ma légère crainte, il me répond :
“Vous avez bien raison de vous méfier des chevaux : ces grosses bêtes fragiles ont donné aux hommes l’illusion de la puissance ! “.
L’auteur a voyagé à cheval dans le monde entier, et l’ouvrage s’attache particulièrement à la Russie, que Jean-Louis Gouraud a abordé dans d’autres écrits, dont en particulier un tout aussi savoureux « Heureux qui communiste a fait un beau voyage… », paru chez Favre en 2023. Là, c’est une galerie de portraits de personnages qui ont marqués l’histoire récente, et qui ont tous plus ou moins trempé dans l’espérance communiste.
Ses textes, d’une plume alerte, fourmillent de traits d’esprit, d’allusions, et il y a, ici, une démonstration de l’art d’insérer de larges digressions dans le texte.
J’ai fait, incidemment et à distance, la connaissance de Jean-Louis Gouraud parce qu’il est l’auteur de l’aimable recension de mon ouvrage (lui aussi foisonnant…) « Voyageries » dans le « Bulletin de liaison de membres de la Société de Géographie – no. 47 – septembre 2025 ». Venant de lui, ce fut un réconfort face à l’assaut des doutes post-édition.
Roland Meige – 04.11.2025
