L’île des otaries, par Renzo TRENTA

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Extrait du « Carnet de bord du voyage en Patagonie » de Renzo Trenta

Traduit de l’italien par Marina Gasperini

Nous arrivons devant les plages de l’île des Lions et jetons l’ancre, il y a un vent de 10/15 nœuds, le soleil apparaît, mais il est couvert par les nuages. On entend des bruits dehors, on sort et on trouve un troupeau de phoques qui jouent autour du bateau. Nous mettons le canot à l’eau et nous nous dirigeons vers la plage, où se trouvent les lions de mer. Nous allons ramer pour ne pas effrayer les animaux. Les phoques nous suivent en nageant à côté du canot: il y a deux énormes mâles et une vingtaine de phoques. Nous ramons avec prudence, accompagnés par cet incroyable cortège d’animaux curieux, qui sortent parfois la tête en poussant avec leurs nageoires dorsales, comme les lémuriens qui scrutent la savane en se tenant près de leur tanière. Ils nous accompagnent à terre et ils s’arrêtent à guère plus de 5 mètres du rivage lorsque nous débarquons. En arrivant, nous apercevons les pingouins de Magellan sur le rivage. En les suivant à terre, nous arrivons à une hutte en tôle abandonnée. Tout au long du chemin du retour parmi les buissons il y a beaucoup de pingouins noirs et blancs cachés sous les buissons et les racines qu’ils ont arrachées. Lorsque nous nous approchons, ils restent immobiles dans leur tanière et bougent la tête pour nous regarder, d’abord avec un œil, puis avec l’autre. Très lentement, nous arrivons vers la plage où se trouvent les otaries et nous parvenons à nous approcher jusqu’à environ 12 mètres. Nous photographions et filmons la scène. De la position couchée, elles passent à celle avec le buste relevé sur les ailerons avant, prêtes à attaquer ou à battre en retraite. Ne voulant pas les provoquer, nous nous éloignons. Toute la scène est suivie par les phoques qui, dans l’eau, nous observent. Je me déplace vers le canot au sec sur la plage, loin du grand groupe d’otaries, une septantaine environ. Près de l’endroit où je me trouve, une jeune otarie mâle s’installe sur le rivage, reconnaissable à sa crinière pas trop développée et aux plis de la peau du cou pas trop prononcés. Elle est blessée au cou, on peut voir le rouge de la blessure sur la peau sombre, elle a dû se battre avec des mâles plus gros et maintenant elle se retire du groupe pour se remettre du combat, elle a l’air un peu mal en point, se déplace lentement et semble aussi se débattre. Je m’approche pour prendre des photos, elle ne réagit pas, mais nous suit dans l’eau lorsque nous décidons de déplacer le canot pour le remettre à l’eau. Pendant un moment, nous sommes suivis par les phoques et les otaries, mais ensuite ils se détachent et nous arrivons au bateau en ramant sans leur inquiétante proximité.

La nature sauvage de ces lieux a laissé en moi un sentiment de paix et de bien-être. Au début, je ne voulais pas débarquer, je me suis dit « qu’est-ce qu’il peut bien y avoir d’intéressant ? ». Maintenant, j’éprouve une sensation indescriptible de communion avec la nature, qu’aucun autre endroit ne pourrait donner. Le contact étroit avec ces animaux sans défense vous rend attentifs et admiratifs pour la confiance placée dans l’homme qu’ils voient rarement ici. J’ai pu toucher les pingouins accroupis dans leur nid, sans qu’ils s’enfuient. Je me suis approché d’eux, à cinq mètres des otaries. J’ai frôlé les phoques avec la pagaie du canot.