Du glacier aux «Lacustres»: la construction d’un paysage et la démolition d’un mythe, par Pierre CORBOUD, Laboratoire d’archéologie préhistorique et anthropologie, Institut Forel, Université de Genève

Date: 11.11.2013 à 00:00

Le paysage du bassin genevois se construit dès 18’000 ans avant notre ère, au moment du dernier retrait du glacier du Rhône. Le lac glaciaire, qui occupe tout d’abord une vaste étendue du territoire genevois, se retire progressivement pour occuper enfin les limites qu’on lui connaît actuellement. Le peuplement humain débute quelques millénaires plus tard, vers 13’000 ans av. J.-C., mais ce n’est que 5000 ans avant notre ère que les premiers agriculteurs commencent à marquer de leur emprise le paysage, essentiellement forestier, du Néolithique et de l’âge du Bronze.

Pendant près de trois millénaires, les fluctuations du niveau des lacs vont rythmer le mode de vie et l’habitat des occupants du plateau suisse. Forcés de s’adapter aux changements climatiques, les préhistoriques vont parfois choisir les rives émergées de nos lacs pour y établir leur villages. La découverte en 1854 des restes de ces villages a donné naissance au mythe des «cités lacustres», dont les images idéalisées et romantiques, diffusés il y a encore peu d’années par nos livres d’histoire, ont fait rêver plus d’un écolier. La récupération idéologique et politique de ce mythe trouvait alors une place de choix dans la toute jeune confédération helvétique de 1848, à la recherche d’ancêtres fondateurs présentables.

Aujourd’hui, la réalité scientifique issue des recherches archéologiques les plus récentes dépasse de beaucoup le mythe né à la fin du 19e siècle. Les conditions exceptionnelles de conservation des villages littoraux livrent des informations culturelles et environnementales essentielles sur trois millénaires de l’histoire des régions entourant l’Arc alpin.

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