OUVRAGES PRÉSENTÉS EN 2023

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TABLE DES MATIÈRES

Rubrique tenue par Philippe Martin

. Artistes voyageuses. 1880-1944. L’appel des lointains. Musée de Pont-Aven, Snoeck (Heule, Belgique, mais plus au catalogue), Palais Lumière, 2022, 264 p, 35 €

. ASG; GeoAgenda 4 / 2022; Association suisse de géographie (ASG); Neuchâtel;

. ASG; GeoAgenda 1 / 2023; Association suisse de géographie (ASG); Neuchâtel;

. ASG; GeoAgenda 2 / 2023; Association suisse de géographie (ASG); Neuchâtel;

. Duranteau, Thomas; Canne à sucre & sarcophage. Vie de Périchon-Bey (1860-1929) un ingénieur passionné d’égyptologie, Limoges (Haute-Vienne), Les Ardents Éditeurs, 2022, 254 pages, 29 €

. Ferlinghetti, Lawrence; La Vie vagabonde. Carnets de route (1960-2010), Points Seuil, Paris, 2019, 608 p., 12 €

. Gardelle, Linda; Ayal, une année en Mongolie, 256 p, Gaia, Larbey (Landes), 2017, 12 €

. Ghervas, Stella; Lieux d’Europe : Mythes et limites. Sous la direction de Stella Ghervas et François Rosset, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 300 p, 2008, 37 € 

. Ghervas, Stella; Odessa et les confins de l’Europe : un éclairage historique; pages 107 à 124 de Lieux d’Europe : Mythes et limites. Sous la direction de Stella Ghervas et François Rosset, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 300 p, 37 € 

. Gras, Cédric, Alpinistes de Mao, Stock, Paris, 2023, 300 p, 20.90 €

. Hamon, Hervé; L’Abeille d’Ouessant; 384 p, 1999, Seuil; Paris; 7.95 €

. Hureau, Simon; Sermilik. Là où naissent les glaces. Inspiré de la vie de Max Audibert, BD, Dargaud, Paris, 208 pages, 2022, 24 €

. Joffrin, Laurent; Dans le sillage de l’Invincible Armada, 180 p, Paulsen, Paris, 2018, 8 €

. Kauffmann, Jean-Paul, L’Arche des Kerguelen. Voyage aux îles de la Désolation; Flammarion, 1993, 252 p., 8.70 €

. Kauffmann, Jean-Paul, Remonter la Marne; Le Livre de Poche; Paris; 2014, 320 p., 7.90 €

. Kersnovskaïa, Euphrosinia, Envers et contre tout. Chronique illustrée de ma vie au Goulag, Paris, Christian Bourgeois, 2021, 624 pages, 35 €

. Koenig, Gaspard; Notre vagabonde liberté. À cheval sur les traces de Montaigne, 608 p, Pocket, Paris, 2021, 9,70 €

. Morris, Jan; Trieste ou le sens de nulle part, Petite Bibliothèque Payot, Paris, 225 p, 2018, 8 €

. Mouchard, Christel; L’Aventurière de l’Étoile. Jeanne Barret, passagère clandestine de l’expédition Bougainville; Pocket, Paris, 319 p, 2020, 7.70 €

. Navarre, Francis; De l’Hexagone considéré comme un exotisme, Le dilettante, Paris, 224 p, 2021, 17.50 €

. Ndjékéry Nétonon Noël; Il n’y a pas d’arc-en-ciel au paradis; 2022; Hélice Hélas; 376 p., 28 CHF, 20 €

. Pichard, Alain; Sur la trace de mots vagabonds, Gollion, Infolio, 2023, 551 pages, 18 €

. Poiraudeau, Anthony : Churchill, Manitoba, Ed. Inculte, Paris, 158 p, 2017, 15.90 €

. Rolin, Jean, Crac, P.O.L., Paris, 2019, 192 p., 18 € (également en éd. de poche)

. Rolin, Jean, Le Pont de Bezons, P.O.L., Paris, 2020, 240 p., 19 € (également en éd. de poche)

. Roth, Simon et Hubert, Samuel; Le Valais à la carte. La cartographie valaisanne à travers les âges; Editions Monographic; Sierre; 2023; 152 p, 230 x 290 mm ; 50 CHF

. Rumiz, Paolo; Appia, Gallimard, Paris, 576 pages, 17 €

LISTE DES RECENSIONS de 2023

. Abolivier Gwenaëlle; Ella Maillart. L’intrépide femme du globe, Paris, Editions Paulsen, 2023, 240 pages, 39,90 €, présenté par Roland Meige

. Bätzing, Werner et Rougier, Henri; Les Alpes. Un foyer de civilisation au cœur de l’Europe, LEP Éditions Loisirs et Pédagogie SA, Le Mont-sur-Lausanne, 2005, 515 page, 59 CHF, présenté par Roland Meige

. Dictionnaire Lévi-Strauss, dir. Jean-Claude Monod; Paris, Robert Laffont Bouquins, 2022, 1248 pages, 33 €, présenté par Roland Meige, avec deux ouvrages de Pascal Bruckner
Bruckner, Pascal; Le sacre des pantoufles. Du renoncement au monde; essai; Paris, Grasset, 2022, 162 pages, 18 €
Bruckner, Pascal; Un coupable presque parfait. La construction du bouc-émissaire blanc; essai; Paris, Grasset, 2020, 352 pages, 20.90 €

. Jubber, Nicholas; Sur les chemins nomades. De l’Atlas à Tombouctou, Les Éditions Noir sur Blanc, Lausanne 2021, 432 pages, 24 €, présenté par Roland Meige

. Mandagaran, Bernard; Le Canal, roman, Paris, Éditions Le Sémaphore, 2023, 428 pages, 25 €, présenté par Philippe Martin

. Steinbeck, John; Capa Robert (photographies), Journal Russe, Gallimard, 304 pages, 69 ill., 190 x 240 mm, 39 €, présenté par Roland Meige

PRÉSENTATIONS DÉTAILLÉES

Pichard, Alain; Sur la trace de mots vagabonds, Gollion, Infolio, 2023, 551 pages, 18 €

La géographie des mots, un ouvrage étonnant d’une vaste érudition.
PhM, sgeo

La richesse du français est si vaste que l’on soupçonne mal à quel point chaque mot peut nous faire voyager loin dans le temps et dans l’espace
Raconter l’itinéraire de quelques-uns de ces mots vagabonds qui ont fait souche dans la langue française (et ailleurs) après de longs périples en caravane, en caravelle ou en chemin de fer: tel est le but de cet ouvrage.

Il n’y a pas que les hommes qui migrent. Les mots voyagent aussi. Ils sont vagabonds, ils passent d’une langue à l’autre. Certains ont, au cours des siècles, traversé la moitié de la planète. Raconter l’itinéraire de quelques-uns de ces mots vagabonds qui ont fait souche dans la langue française (et ailleurs) après de longs périples en caravane, en caravelle ou en chemin de fer: tel est le but de cet ouvrage. Mais il ne se limite pas aux mots qui bourlinguent dans l’espace. D’autres mots, tout en demeurant sur place, ont voyagé dans leur propre signification, ont subi des glissements de sens divers selon les époques et les régions. Enfin, il arrive même que les noms (d’objets, de lieux, de familles…) subsistent alors que la langue de l’endroit a changé, phénomène fréquent sur les frontières de la Suisse romande.

Alain Pichard, bilingue, est né en 1943 à Zurich, où il a suivi sa scolarité. Il a étudié les langues, l’histoire et la géographie à l’Université de Lausanne et a travaillé comme journaliste à la rubrique nationale du quotidien 24 Heures. Il s’est d’abord intéressé aux singularités cantonales et aux minorités linguistiques, puis aux origines et à l’évolution des mots et à l’étymologie des noms de lieux et des noms de famille. Il a publié, aux Éditions 24 Heures, Vingt Suisses à découvrir (1975), La Romandie n’existe pas (1978), ensuite réunis dans La Suisse dans tous ses États (1987), puis Les Grisons, mosaïque d’une nation alpine (1987) et enfin, aux Presses polytechniques et universitaires romandes, La Question jurassienne (2004, rééd. 2006).

Duranteau, Thomas; Canne à sucre & sarcophage. Vie de Périchon-Bey (1860-1929) un ingénieur passionné d’égyptologie, Limoges (Haute-Vienne), Les Ardents Éditeurs, 2022, 254 pages, 29 €

Admirable travail de recherche historique de l’auteur et présentation exemplaire (iconographie, maquette, impression).
PhM

4e de couverture

Jean-André Périchon (1860-1929) entre à 25 ans au service du khédive (vice-roi d’Égypte) et travaille avec dévouement pendant 22 ans dans les sucreries en Moyenne-Égypte, ce qui lui vaut le titre oriental convoité de « bey ». Très vite il se passionne pour l’Égypte pharaonique et cons­titue une collection d’environ 4000 objets antiques dont l’importance est reconnue par les plus grands égypto­logues qu’il côtoie, tel le célèbre Gaston Maspero. Ces antiquités se trouvent aujourd’hui en grande partie conservées au musée des Beaux-Arts de Limoges et aux Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles mais également dispersées dans divers musées dans le monde.

Au-delà de l’image du collectionneur, cette étude révèle de multiples facettes méconnues de Périchon-Bey permettant de mieux comprendre le parcours d’une personnalité attachante qui n’est en rien la figure d’un explorateur pilleur. Il apparaît dans ce livre tour à tour bon élève des Arts et Métiers, directeur investi dans le développement de ses sucreries, archéologue averti en Égypte et en Limousin, aide essentielle pour les égyptologues, protecteur d’objets monumentaux, auteur d’une carte d’Égypte diffusée dans les écoles, maître d’œuvre de son château orientalisant à Bessines-sur-Gartempe (Haute-Vienne) et du surprenant «  musée du Boulaq en Limousin  ».

À travers la donation de sa collection d’œuvres antiques, Jean-André Périchon-Bey et sa femme Henriette confir­ment leur volonté de transmettre avec ces objets le souvenir de leur rencontre profonde et durable avec un pays chargé d’histoire et une culture.
En suivant leur parcours de vie, Thomas Duranteau nous invite à partager la passion de ce couple pour l’Égypte et à plonger dans cette époque fascinante de la fin du XIXe siècle, au cours de laquelle le développement indus­triel du pays se conjugue avec un véritable âge d’or de l’égyp­tologie, où chaque coup de pioche dans les sables des nécropoles pouvait apporter des révélations scientifiques inattendues et extraordinaires.

Thomas Duranteau est historien, auteur et illustrateur.

Plusieurs de ses ouvrages cherchent à mettre en relation les approches documentaires et sensibles ainsi que l’écriture et le dessin. Il a reçu le Prix Mémoires de la Mer 2017 pour son livre Narcisse Pelletier, la vraie histoire du sauvage blanc et le Prix du Club de la Presse 2012 pour Des miettes et des étoiles, un carnet de voyage dans les camps nazis salué par Simone Veil comme « une réalisation originale, pertinente, sensible et juste ».

La collection égyptienne du musée des Beaux-Arts de Limoges est également au centre d’un de ses précédents livres artistiques Maîtres de Vie.

Kersnovskaïa, Euphrosinia, Envers et contre tout. Chronique illustrée de ma vie au Goulag, Paris, Christian Bourgeois, 2021, 624 pages, 35 €

Alors qu’elle est à peine âgée de trente ans, Euphrosinia Kersnovskaïa voit l’URSS imposer le joug soviétique à la Bessarabie, où sa famille s’est installée après la révolution. Victime de la collectivisation, Euphrosinia perd tout. Très vite, elle est envoyée sur un chantier d’abattage de bois en Sibérie. Elle s’évade, erre des mois seule dans la taïga, puis finit par être arrêtée et condamnée à des années de camp – pour finalement travailler dans des mines de charbon. Une fois libre, elle produit cette œuvre inouïe : un récit où le témoignage écrit cohabite avec des dessins réalisés sur des cahiers d’écolier – en illustrant elle-même son histoire, elle restitue dans les moindres détails les scènes dont elle a été témoin et auxquelles elle a participé. Sa destinée s’apparente à celle des plus grandes héroïnes de roman. On se demande avec stupéfaction comment autant d’épreuves et de malheurs peuvent tenir en une seule vie : Euphrosinia affronte les obstacles de sa vie d’un cœur pur et candide, faisant toujours passer les autres avant elle-même. Le dessin, qui aurait pu n’être pour elle qu’un simple passe-temps, devient entre ses mains la lance de Don Quichotte qui lui sert à pourfendre inlassablement le mal.

Écrit à l’insu des autorités, Envers et contre tout est le récit d’un destin hors du commun. Un témoignage fort et inspirant, l’odyssée d’une irréductible qui constitue une source de joie profonde, un antidote aux compromissions et à la peur, au mensonge et à l’oubli.

GeoAgenda 2 / 2023; Association suisse de géographie (ASG); Neuchâtel;

GeoAgenda 1 / 2023; Association suisse de géographie (ASG); Neuchâtel;

Artistes voyageuses. 1880-1944. L’appel des lointains. Musée de Pont-Aven, Snoeck (Heule, Belgique, mais plus au catalogue), Palais Lumière, 2022, 264 p, 35 €

Reprise ci-dessous du commentaire sur l’exposition temporaire (24.6-5.11.2023):

https://www.museepontaven.fr/fr/content-page/62-a-voir/269-artistes-voyageuses-24-juin-5-novembre-2023

L’exposition Artistes voyageuses l’appel des lointains, 1880-1944 réunit une trentaine d’artistes et de photographes, de la « Belle Époque » à la Seconde Guerre mondiale, dont les itinéraires artistiques ont emprunté les routes de l’ailleurs, du continent africain à l’Orient lointain. 

Les quelque cent cinquante peintures, sculptures, dessins, affiches, gravures et photographies, présentées sur 320m2 d’exposition, sont d’une grande diversité stylistique, échappant aux classifications de l’histoire de l’art canonique.

Provenant des collections publiques et privées françaises, regroupées pour la première fois dans un musée, elles invitent à un voyage inédit dans le temps et dans l’espace.

UN PEU D’HISTOIRE

Dès la fin du XIXe siècle, un nouveau contexte, celui des premiers mouvements féministes, encourage les femmes à s’affirmer hors de l’espace domestique et promeut l’image d’une « femme nouvelle » actrice de son destin. Leur formation académique, effectuée à l’École des Beaux-Arts ou dans les académies privées, permet aux artistes femmes d’acquérir un statut professionnel, d’exposer aux salons, d’obtenir des bourses de voyage, des commandes pour les compagnies maritimes ou pour les expositions universelles et coloniales.

Le tournant du XXe siècle est marqué par un renouvellement d’intérêt pour l’orientalisme, stimulé par le tourisme d’hivernage, notamment à Biskra, et encouragé par les expositions de la Société des peintres orientalistes français auxquelles participent Marie Caire-Tonoir, Marie Lucas-Robiquet et Andrée Karpelès.

À partir des années vingt, ce sont les territoires de « la Plus Grande France » qui invitent de nombreuses artistes aux voyages, de l’Afrique équatoriale à Madagascar, jusqu’à la péninsule indochinoise. C’est le cas de Marcelle Ackein, Alix Aymé, Monique Cras, Marthe Flandrin, Anna Quinquaud, Jane Tercafs, Jeanne Thil. D’autres voyagent jusqu’au Tibet et en Chine, telles Alexandra David-Néel, Léa Lafugie et Simone Gouzé. Pour Denise Colomb et Thérèse Le Prat, le voyage devient le moteur d’une carrière de photographe.

UN MOT SUR L’EXPOSITION

L’exposition s’intéresse aux rares artistes n’appartenant pas à la culture occidentale qui ont voyagé, les chinoises Fan Tchunpi et Pan Yuliang venues étudier aux Beaux-Arts de Paris, puis séjournant en Europe et en Chine.

Contrairement aux récits des grandes voyageuses du XIXe qui parcouraient le monde, du Spitzberg au Cap Horn, les itinéraires empruntés par ces artistes suivent la carte de l’expansion hégémonique européenne et plus particulièrement celle de la colonisation française sous la Troisième République. Le regard des artistes femmes est sans conteste différent de leurs homologues masculins. La présence de nombreux portraits indiquent leur recherche d’une proximité avec les populations rencontrées, notamment celle des femmes dans leurs vies quotidiennes, auxquelles elles ont plus facilement accès.

Si cette traversée d’un monde colonisé est exempte d’une vision raciste et caricaturale, elle ne s’accompagne pas pour autant d’une remise en question de la « mission civilisatrice » de la France. Lucie Cousturier est la seule, parmi les artistes, à critiquer le système colonial, et à s’être engagée. Sa vie a basculé lorsqu’elle rencontre en 1916, des tirailleurs africains, installés dans un camp militaire, près de sa maison à Fréjus. Elle leur apprend bénévolement le français, se lie d’amitié avec plusieurs d’entre eux. En 1921, elle embarque à Marseille pour un voyage de dix mois du Sénégal au Soudan français. Mes inconnus chez moi (1920 ) et Mes inconnus chez eux ( 1925) sont les récits de cette aventure humaine.

Vous pouvez consulter le site sur Jeanne Tercafs : https://jeannetercafs.be/oeuvres/

Gardelle, Linda; Ayal, une année en Mongolie, 256 p, Gaia, Larbey (Landes), 2017, 12 €

Son bac en poche, Linda Gardelle part vivre un an en Mongolie : apprendre le mongol, vivre au quotidien avec les nomades, chevaucher dans la steppe, et souffrir aussi, de déceptions à la hauteur de ses espoirs, et de la désolation face à une modernisation qui n’épargne pas ses plus mauvais côtés à la Mongolie.

Joffrin, Laurent; Dans le sillage de l’Invincible Armada, 180 p, Paulsen, Paris, 2018, 8 €

Un récit historique au fil de l’eau qui fait revivre l’une des batailles navales les plus mythiques.

C’était un soir de novembre à Ramsgate. Pleg Mor roulait au mouillage. Je racontais à l’équipage l’odyssée de l’Invincible Armada lancée à l’assaut de l’Angleterre protestante, quand l’idée m’apparut : pourquoi ne pas refaire sur mon voilier le périple de la flotte espagnole, dont le sort funeste a changé le cours de l’Histoire ?
Pourquoi ne pas en tirer un roman vrai qui raconterait la mer et les batailles, mêlant le récit d’hier à celui d’aujourd’hui, la grandiose défaite des galions et les humbles aventures d’un sloop fragile naviguant dans leur sillage. Un voyage dans l’espace et dans le temps, qui ferait revivre les affres de Medina Sidonia, l’amiral espagnol, les ruses de Francis Drake, le corsaire de la reine, et la vie terrible des marins du XVIe siècle.
Un livre de mer qui serait aussi un livre d’histoire, un carnet de route au fil des côtes embrumées et des siècles évanouis, un tour de Grande-Bretagne sur un esquif de onze mètres. Ce livre de bord et d’épopée, le voici.

Prix Éric Tabarly 2019
Prix Albatros Sail the World 2019
Mention Spéciale du Prix Mémoires de la Mer 2019

Koenig, Gaspard; Notre vagabonde liberté. À cheval sur les traces de Montaigne, 608 p, Pocket, Paris, 2021, 9,70 €

De Bordeaux à Rome, Gaspard Koenig a retracé, à cheval, le parcours de Montaigne, 440 ans plus tard. À la lueur de ce voyage initiatique, le philosophe livre ses pensées et son traité pour un nouvel humanisme européen.

Suivant les notes laissées par Montaigne dans son Journal de Voyage, Gaspard Kœnig a retracé le trajet du philosophe pour le parcourir à son tour, à dos de cheval. Il a ainsi traversé la France et l’Italie passant par le Périgord, la Champagne, les Vosges, la Bavière, la Toscane…

Au-delà de cette véritable épopée, il s’agit pour le philosophe d’aller à la rencontre des Européens, dans les pas d’un humaniste qui ignorait les frontières et qui aimait voyager pour « frotter et limer sa cervelle contre celle d’autrui ». Sur le même modèle, Gaspard Koenig nous offre un voyage philosophique, entrepris afin de confronter notre monde contemporain à son passé, et, plus encore, à son avenir pour dessiner, un nouvel humanisme européen.

Gaspard Koenig est philosophe et écrivain.

Il a publié une quinzaine de romans et d’essais, parmi lesquels Octave avait vingt ans (Grasset, 2004 ; prix Jean-Freustié 2005), Leçons de conduite (Grasset, 2011), Leçons sur la philosophie de Gilles Deleuze (Ellipses, 2013), Le Révolutionnaire, l’Expert et le Geek (Plon, 2015 ; prix Zerilli-Marimo et prix Turgot), Kidnapping (Grasset, 2016), Contr’un : pour en finir avec les présidentielles (Éditions de l’Observatoire, 2022. En 2023, Pocket reprend Notre vagabonde liberté, après sa parution en 2021 aux Éditions de l’Observatoire.

Morris, Jan; Trieste ou le sens de nulle part, Petite Bibliothèque Payot, Paris, 225 p, 2018, 8 €

« La gentillesse est ce qui compte, du début à la fin, à tout âge – la gentillesse, le principe souverain de nulle part ! »

Trieste, ville énigmatique construite pour être le port principal d’un empire continental, ville à l’éblouissant pedigree littéraire (Joyce, Svevo, Stendhal, Rilke, Proust, Magris, etc.), où même Freud vint étudier la mystérieuse sexualité des anguilles, ville frontière, ville où, de l’Autriche-Hongrie à l’Allemagne nazie, de l’Italie fasciste aux tensions de la guerre froide, l’Histoire n’a cessé de se donner rendez-vous, ville paradoxale de toutes les politesses où, longtemps, les habitants se sentirent bien, Trieste, un jour, devint triste, et inutile. Avec sensibilité, Jan Morris saisit à la perfection le génie de ce lieu mythique qui fut plus, dans sa vie, qu’un lieu de passage.

Célèbre journaliste et historienne spécialiste des empires, Jan Morris (1926- 2021) est considérée comme l’une des meilleures travel writers de langue anglaise. Quand elle s’appelait encore James, elle fut le seul journaliste à accompagner Hillary et Norgay dans leur ascension de l’Everest en 1953. Certains de ses nombreux livres sont d’ores et déjà des classiques.

Mouchard, Christel; L’Aventurière de l’Étoile. Jeanne Barret, passagère clandestine de l’expédition Bougainville; Pocket, Paris, 319 p, 2020, 7.70 €

Ile d’Aix, 1767. L’expédition de Bougainville s’apprête à faire le tour du globe et, au nom du roi de France, en ramener tous les savoirs, toutes les merveilles… Flanqué de son valet, le botaniste et libertin Philibert Commerson monte à bord de L’Etoile. Mais ce  » valet  » aux joues tâchées de son, il faudra atteindre Tahiti avant que l’équipage ne commence à soupçonner son identité… Quel destin que celui de Jeanne Barret ! Petite bergère du Morvan, elle n’apprendra à lire, puis à herboriser qu’au contact de son amant et mentor, Commerson.

Embarquée clandestinement à ses côtés, les femmes étant interdites à bord, c’est sans état d’âmes qu’elle se jette au-devant de l’aventure. Comme un homme. Mieux : comme une femme !

Malgré le peu de renseignements qui existe, Christel Mouchard nous révèle ce destin extraordinaire.

Navarre, Francis; De l’Hexagone considéré comme un exotisme, Le dilettante, Paris, 224 p, 2021, 17.50 €

Au géologue le concassage et l’inventaire du sol, au géographe l’arpentage et le catalogage du terrain, mais au randonneur, au rêveur ambulant l’approche méticuleuse et gustative du paysage, l’épreuve jubilatoire de ses hauts et de ses bas, le détail savoureux de son peuplement et l’expérience de ses diversités. La France se chine en effet comme une bonne brocante géographique. C’est ce que nous prouve avec allégresse Francis Navarre dans De l’Hexagone considéré comme un exotisme. Apologie de la dérade mécanique, circulation pratiquée à dos de moto, – une Guzzi dont l’anatomie est analysée par le menu –, et guide routardier à pied robuste et à foulée ardente (« marcher est une jouvence ») où s’expose tout un art de la trajectoire, un sens de l’étape peu commun et surtout une réhabilitation de la balade gauloise. On découvre entre autres une « suite lorraine » qui confronte notamment usines des temps révolus et désuétude charmante des lieux de cure, un éloge du Massif central et une amoureuse évocation de l’Aveyron et des Cévennes. À chaque fois, Navarre prend son risque, trace sa route comme on jette les dés, se laissant bercer par le nom des villages et l’intitulé des lieux-dits, mélange grisant d’érudition et de surprises. Il nous apprend le prix d’une grille d’égout, compose un magnifique éloge du parapluie et du parfum du bois brûlé, rédige la fiche technique de la Vierge du Puy (pur acier militaire), etc. L’ailleurs tant vanté est sans doute plus affaire de regard que de destination. Telle est la morale du marcheur.

Rumiz, Paolo; Appia, Gallimard, Paris, 576 pages, 17 €

« De notre aventure, je ne sais pas ce qui est resté le plus clairement imprimé dans mon esprit: les visages ou les paysages, les pierres que nous avons vues ou les atmosphères que nous avons flairées en chemin. Ce qui est sûr, c’est que ce voyage a été le plus terre à terre et en même temps le plus visionnaire de tous ceux que j’ai faits. Tandis que le poids de mon sac à dos m’ancrait fermement au sol, ma tête vagabondait parmi les nuages, à la manière d’un cerf-volant, et en même temps la bonne chère méditerranéenne provoquait d’appétissants courts-circuits avec l’Histoire. »

Dans cette bible voyageuse, Paolo Rumiz ressuscite la Via Appia, vingt-trois siècles après sa construction. Après six cent douze kilomètres et vingt-neuf jours de marche, Rumiz dégage cette voie légendaire des toiles d’araignées sous lesquelles l’oubli et l’incurie l’avaient ensevelie. Pas après pas, il nous conduit vers les merveilles cachées de la mère de toutes les routes, plus ancienne et plus variée que le chemin de Compostelle.

Ce récit passionnant propose, pour la première fois, une cartographie complète de ce parcours mythique reliant Rome à la Méditerranée. En restituant la Via Appia au patrimoine européen, Paolo Rumiz espère « qu’une armée de voyageurs vienne à leur tour suivre ce fil d’Ariane qui serpente à travers les splendeurs de l’Italie méridionale ».

Hureau, Simon; Sermilik. Là où naissent les glaces. Inspiré de la vie de Max Audibert, BD, Dargaud, Paris, 208 pages, 2022, 24 €

À 18 ans Max a décidé de quitter Marseille pour s’installer sur la côte Est du Groenland. Dans le village isolé de Tiniteqilaaq où il habite depuis trente ans, il a appris des Inuits leur mode de vie particulièrement rude, à l’aune d’une nature aussi magnifique qu’impitoyable. Un parcours quasi-initiatique, fait de moments intimes ou épiques, dont Max a confié le récit à Simon Hureau. L’auteur de L’Oasis nous propose ici la biographie d’un homme ordinaire qui a choisi de vivre son rêve dans l’un des endroits les plus inhospitaliers de la planète.

Lieux d’Europe : Mythes et limites. Sous la direction de Stella Ghervas et François Rosset, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 300 p, 2008, 37 € 

Alors qu’elle s’interroge, se regarde et se raconte depuis des siècles, l’Europe demeure perplexe au miroir de ses inépuisables productions. Elle est à l’étroit dans les paragraphes étriqués des documents juridiques, elle tend à se soustraire aux appropriations idéologiques de toutes obédiences, dépasse toujours les images d’elle-même qu’elle crée sans relâche, échappe à sa propre histoire comme à ses historiens, à ses géographes et à tous ceux qui s’efforcent de la définir. Mais elle offre à l’expérience et à l’imagination des hommes la richesse infiniment diversifiée de son patrimoine. S’il est encore et toujours difficile de dire l’Europe, du moins peut-on la percevoir et la toucher, surtout en ces lieux singuliers mais innombrables où se livre au regard et à l’esprit un surcroît de sens. Frontières, carrefours, passages, noeuds urbains, vastes plaines, lieux de commémoration ou de mémoire : ce sont quelques-uns d’entre eux qui ont inspiré les auteurs de cet ouvrage. Dire l’Europe, sous leurs plumes croisées, c’est la redire sans cesse dans la multiplicité de ses manifestations particulières.

Stella Ghervas est chargée de recherche en histoire à l’Institut universitaire de hautes études internationales de Genève.

François Rosset est professeur de littérature et culture françaises à l’Université de Lausanne et à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.

Avec les contributions de : Wladimir Berelowitch, Denis Bertholet, Lucian Boia, Sofia Dascalopoulos, Pascal Dethurens, Silvio Guindani, Olga Inkova, Lubor Jilek, Bertrand Lévy, Krzysztof Pomian, René Sigrist, Luc Weibel, Eric Widmer

Odessa et les confins de l’Europe : un éclairage historique

Stella Ghervas, pages 107 à 124 de l’ouvrage précédent

Il s’agit ici d’un très intéressant et complet éclairage historique paru en 2008.

Lien vers le texte complet en Open Books:

https://books.openedition.org/editionsmsh/784?lang=fr

Anthony Poiraudeau : Churchill, Manitoba, Ed. Inculte, Paris, 158 p, 2017, 15.90 €

Quelle magnifique découverte que ce livre pour un géographe ! Et voici comment le site Confluence (https://www.confluences.org/artiste/poiraudeau-anthony/) présente l’auteur de de bijou autant littéraire que politique et géographique :

« Après des études d’histoire de l’art et un doctorat à l’EHESS (École des Hautes Études en Sciences Sociales sur les notions de lieu et de paysage dans l’art contemporain, Anthony Poiraudeau se consacre à la littérature, d’abord sur son blog futiles et graves et sur le blog collectif le convoi des glossolales (qu’il créé en 2009 et administre jusqu’en 2014), ainsi qu’en participant occasionnellement au site internet de création littéraire remue.net. Son premier livre, Projet el Pocero : dans une ville fantôme de la crise espagnole, paraît en 2013 aux éditions Inculte. Il s’agit du récit d’une déambulation dans une ville fantôme auquel se mêlent des éléments d’essai à propos des villes, de la spéculation immobilière et de l’histoire espagnole contemporaine. En 2014, il bénéficie d’une Mission Stendhal, attribuée par l’Institut Français, qui lui permet de séjourner un mois dans une petite ville du Grand Nord canadien, cadre de son deuxième livre. La même année, il devient membre du comité de rédaction de la revue de « littérature et d’appels d’air » La moitié du fourbi, qui publie deux numéros par an. Il écrit aussi régulièrement pour la revue 303 : arts, recherches, créations. Depuis 2017, il est membre du Conseil d’Administration de l’association 303 (éditrice de la revue 303). Depuis 2017 également, il anime occasionnellement des rencontres avec des écrivains pour la librairie nantaise La Vie devant soi, et anime à une fréquence hebdomadaire des ateliers d’écriture dans le cadre d’une classe préparatoire aux écoles d’art en Vendée. En octobre 2017 paraît son deuxième livre, Churchill, Manitoba, publié par les éditions Inculte. Il s’agit d’un récit, ou d’un roman non fictionnel, à propos d’une petite ville du Grand Nord canadien, du désir d’un lieu lointain et de la rêverie sur les cartes de géographie. »

A partir d’une carte Vidal-Lablache, – de celles que nous avons quasiment tous vues dans nos salles de classe – sur l’Amérique du Nord, l’auteur décide de se rendre, sans aucune raison que la présence de cette ville au nom surprenant isolée sur les rives de la Baie d’Hudson, dans la ville de Churchill. Il ne sait pas vraiment ce qu’il y cherche, se demande souvent pourquoi il y est mais découvre progressivement cette bourgade apparemment sans intérêt et son histoire récente marquée par le drame des déportations de population autochtone. Et comme le dit la quatrième de couverture de son livre : « Entre récit de voyage et chronique sociale, Anthony Poiraudeau nous offre un texte tour à tour drôle, grave et profondément touchant. »

GeoAgenda 4 / 2022; Association suisse de géographie (ASG); Neuchâtel;
https://swissgeography.ch/fr/geoagenda

Gras Cédric, Alpinistes de Mao, Stock, Paris, 2023, 300 p, 20.90 €

Ils s’appelaient Xu Djin et Liu Lianman, n’avaient jamais vu de montagnes auparavant et encore moins pratiqué l’alpinisme de quelque façon que ce soit. En 1960, le Parti communiste chinois les élève au grade de «  désignés volontaires  » et leur commande ainsi qu’aux camarades qui les accompagnent de conquérir le Qomolangma, tel que les gens du cru désignent l’Everest depuis toujours. Mission supplémentaire, ils sont tenus de déposer sur le toit du monde (8849 mètres) un buste de Mao Zedong en un geste symbolique supposé souligner la conquête définitive du Tibet. Le climat de propagande est tel que l’opinion du pays tout entier néglige que la plus haute montagne de la planète a été vaincue une première fois sept ans plus tôt depuis le versant népalais par Edmund Hillary et Tensing Norgay.

Au terme d’une enquête approfondie, Cédric Gras qui a fréquenté ces confins à plusieurs reprises, restitue, sur fond de famine paysanne et de répression à grande échelle, cette ascension nimbée de mystère et de mensonges. Ces spécialistes improvisés côtoient la mort qui sans cesse menace, et les corps bien réels de Sandy Irvine et George Mallory, disparus en 1924. Malgré leur dévouement et leur obstination, Xu Djin et Liu Lianman n’en finiront pas moins dans un camp de rééducation de la Révolution culturelle avant d’emporter dans leurs tombes les secrets himalayens du régime chinois.

Avec le savoir-faire qu’on lui connaît, grâce à toute une série de documents inédits, en mandarin en en russe, Cédric Gras a reconstitué le destin hors-norme de ces prolétaires que rien ne prédestinait au vertige des cimes.

Né en 1982, Cédric Gras a suivi des études de géographie à travers le monde et dirigé différentes Alliances françaises dans l’espace post-soviétique. Il continue aujourd’hui de sillonner les immensités eurasiatiques pour ses écrits et des films. Il a publié chez Stock L’Hiver aux trousses (2015), Anthracite (2016), Saisons du voyage (2018) et Alpinistes de Staline (prix Albert Londres du livre 2020).

Hamon Hervé; L’Abeille d’Ouessant; 384 p, 1999, Seuil; Paris; 7.95 €

L’Abeille Flandre fut l’un des plus puissants remorqueurs de haute mer du monde, en station à Brest. Vingt-quatre heures par jour, 365 jours par an, sa mission était de garder Ouessant, le cap Horn de l’Europe. Hervé Hamon a partagé pendant dix huit mois le quotidien des chasseurs de tempête : le travail sur le pont, les nuits de veille, et les dangers d’un métier où l’on risque librement sa vie pour en sauver d’autres.
Hervé Hamon est écrivain, éditeur et cinéaste. Son ouvrage Besoin de mer a reçu le prix Henri Queffélec du livre maritime et Le Livre des tempêtes le prix Nadar. Il a été élu écrivain de marine. Il est également le coauteur, avec Patrick Rotman, de maintes grandes enquêtes, dont Génération, disponible en Points

Ferlinghetti Lawrence; La Vie vagabonde. Carnets de route (1960-2010), Points Seuil, Paris, 2019, 608 p., 12 €

Sans lui, la Beat Generation n’aurait pas existé. Lawrence Ferlinghetti, du haut de ses 100 printemps, en est la dernière voix vive et l’âme secrète. Fondateur de la librairie City Lights à San Francisco, qui fut le laboratoire d’où jaillirent les œuvres de Kerouac, Corso, Ginsberg et consorts, Ferlinghetti lui-même a toujours refusé d’être considéré comme un écrivain beat. Pourtant, sa Vie vagabonde prouve avec panache qu’il fut bel et bien l’un des artisans les plus exceptionnels de ce mouvement, et l’un des poètes majeurs du vingtième siècle américain.
Cinquante années durant, cet homme aux semelles de vent aura bourlingué d’un bout à l’autre de la planète, les poches remplies de carnets et de bouts de crayon. De La Havane à l’Australie, des plages de Bélize aux pavés de Paris, du Transsibérien au Nicaragua en passant par les grands-routes de l’Amérique – Ferlinghetti est partout, tout le temps, et rencontre tout le monde : Castro et Neruda, les plumes dissidentes de l’Union soviétique et les chantres de la révolution internationale, Ezra Pound et William S. Burroughs – et, surtout, les mille et un visages anonymes d’une humanité que le poète, en digne héritier de Whitman, ne cesse de chanter avec passion, émerveillement et générosité.
Pris sur le vif, animé d’une énergie staccato furieusement beat, ponctué de dessins et de poèmes, tour à tour lyrique, drôle, indigné ou halluciné, ce journal de bord nous livre le témoignage d’un homme profondément engagé qui a traversé le siècle et, à lui seul, le résume.
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Nicolas Richard
Lawrence Ferlinghetti est né le 24 mars 1919 à Yonkers, dans l’État de New York. Poète, éditeur, libraire, peintre, militant et voyageur au long cours, il est le fondateur de la mythique librairie City Lights à San Francisco.

Kauffmann, Jean-Paul, L’Arche des Kerguelen. Voyage aux îles de la Désolation; Flammarion, 1993, 252 p., 8.70 €

« Aux Kerguelen, archipel français perdu des mers australes, il y a beaucoup de messages abandonnés dans des bouteilles mais nul ne les a retrouvés. Depuis quarante ans, je me prépare à ce voyage. J’irai à Port-Christmas pour découvrir l’arche des Kerguelen. Cette voûte de cent trois mètres de hauteur, qui stupéfia tant de navigateurs, évoque l’entrée d’une crypte. Le sens caché de cette France australe longtemps maudite s’y trouve peut-être dissimulé.
Ces îles dites de la Désolation, où règne le vent, passent pour être le point le plus isolé du globe. La solitude y est extrême, rompue seulement par des troupeaux de mouflons, des régiments de chats sauvages, des lapins cachés dans les prairies profondes. On retrouve des tombes partout. Ce que j’entreprends n’est pas un voyage initiatique. Il n’y a pas de Graal à découvrir dans ce district mystérieux que le chevalier de Kerguelen, emprisonné après avoir découvert ces îles en 1772, appelait le « troisième monde ». » J.-P. K.

Kauffmann, Jean-Paul, Remonter la Marne; Le Livre de Poche; Paris; 2014, 320 p., 7.90 €

Remonter à pied la Marne, depuis sa confluence avec la Seine jusqu’à la source, a été pour Jean-Paul Kauffmann une odyssée à travers les paysages d’une France inconnue. L’aventureuse histoire de notre pays lui est apparue à la lumière du présent. Il y a découvert la France des « conjurateurs », ces indociles qui résistent à la maussaderie et chassent les esprits maléfiques d’aujourd’hui. Remonter la Marne, ce n’est pas revenir en arrière et pleurer le passé, mais plutôt se perdre pour mieux renaître. La marche a permis d’entretenir ce rapport profond au temps, au silence, aux rencontres.

Ndjékéry Nétonon Noël; Il n’y a pas d’arc-en-ciel au paradis; 2022; Hélice Hélas; 376 p., 28 CHF, 20 €

Plongée dans les horreurs de la traite négrière transsaharienne. Des caravanes en partance pour la péninsule arabique, en passant par la colonisation française, l’enrôlement des tirailleurs africains jusqu’à l’essor du mouvement djihadiste Boko Haram, Nétonon Noël Ndjékéry explore 200 ans d’histoire de la privation de liberté et de l’exploitation humaine dans la région de l’actuel Tchad. En parallèle, à travers le récit de la fuite du jeune esclave Tomasta et de ses compagnons de route, l’auteur élabore une utopie subtile : celle d’une société afropolitaine, solidaire et ouverte à la diversité ainsi qu’à sa propre histoire.

Rolin Jean, Crac, P.O.L., Paris, 2019, 192 p., 18 € (également en éd. de poche)

« Entre Lawrence et moi, il y a au moins ceci de commun qu’à un peu plus d’un demi-siècle de distance, nous avons passé l’un et l’autre une partie de notre enfance à Dinard. » Et Jean Rolin s’attache, dans ce nouveau livre, à partager un petit plus encore avec celui que l’on a appelé Lawrence d’Arabie…En partant sur ses traces, aujourd’hui, au Moyen Orient.En 1909, l’année de son vingt et unième anniversaire, T. E. Lawrence, qui n’est pas encore « d’ Arabie », entreprend en plein été une marche de près de 1800 kilomètres, au Moyen-Orient, afin de visiter quelque trente-cinq châteaux-forts datant de l’époque des Croisades. Lors des trois étés précédents, il a parcouru la France à bicyclette, visitant presque tout ce que ce pays compte de châteaux-forts afin d’étayer sa thèse de fin d’études à Oxford, consacrée à « L’influence des Croisades sur l’architecture militaire en Europe ».Crac est le récit d’un voyage effectué en 2017/2018, au Moyen-Orient, sur les traces de Lawrence, et guidé par les lettres de celui-ci, avec une insistance particulière sur ceux des châteaux de la région, tel Beaufort dans le sud du Liban, ou en Syrie le Crac des chevaliers (ou Krak), ou le château de Saône/Saladin, ou encore la forteresse de Kerak en Jordanie, auxquels des conflits récents ont conféré un regain d’actualité. Mais avec ce récit Jean Rolin fait bien plus que mettre ses pas dans ceux de Lawrence d’Arabie, il nous confronte subtilement aux errements de notre histoire, et à ses propres mésaventures…« Ainsi avais-je couru, pour finir, en Mercedes et sous la conduite de Charbel, après un château que Lawrence lui-même n’avait pas vu. »

Rolin Jean, Le Pont de Bezons, P.O.L., Paris, 2020, 240 p., 19 € (également en éd. de poche)

« Heureux qui a vu le jour se lever sur le pont de Bezons ». C’est la première phrase de ce roman dont le projet consiste « à mener sur les berges de la Seine, entre Melun et Mantes des reconnaissances aléatoires, au fil des saisons, dans un désordre voulu ». Mais très rapidement ces déambulations prennent des allures de petite odyssée sur les berges du fleuve, au cœur de banlieues bousculées, parcourant des espaces fracassés, des friches et des zones industrielles. Traversée du monde d’à côté, celui que nous ne voyons plus depuis des décennies. De micro évènements prennent une tournure fatale et romanesque, comme la fermeture d’un Mc Donald’s à Bezons ou des parties de pêche organisées par des Rroms. On y croise des réfugiés tibétains sur une péniche à Conflans, un café kurde révolutionnaire à Corbeil, un restaurant brésilien, des mosquées salafistes à Saint-Denis, une base assez confidentielle de la marine nationale. C’est le roman discret d’un monde bouleversant de solitude, d’oublis, de ruines et de décomposition.
Au cœur de ce parcours, il y a aussi les retrouvailles avec une vieille cousine et la maison de Carrières- sous-bois qui cache un secret de famille que le narrateur révèle pour la première fois : le fantôme de l’oncle Joseph. Mais le chaos de ce monde périphérique, sous le regard aigu du narrateur, cache lui aussi un mystère : la présence de toute une vie sauvage et animale nichée souvent dans d’improbables lieux. Oiseaux rares, cygnes sauvages, poissons… Avec humour, Jean Rolin traque les détails des existences, des paysages, des lieux, et les traces historiques d’un décor périurbain qui devient sous nos yeux le roman contemporain de notre abandon.

Roth Simon et Hubert Samuel; Le Valais à la carte. La cartographie valaisanne à travers les âges; Editions Monographic; Sierre; 2023; 152 p, 230 x 290 mm ; 50 CHF

Plus de 1000 cartes imprimées liées au Valais ont été rassemblées au cours des décennies dans la collection de la Médiathèque Valais-Sion. Elle couvre une période allant du milieu du XVe siècle à nos jours, et aborde des thématiques très différentes. Ce livre, qui accompagne une exposition aux Arsenaux, vous présente un bel et riche échantillon des trésors de l’institution. Dans ce domaine fascinant, les techniques d’impression ont bien évolué, tout comme les connaissances techniques, les modes de calcul et les représentations. Les bois gravés des livres de la Renaissance, puis les gravures sur cuivre et la lithographie du XIXe siècle ont laissé la place principale à la version numérisée.
Cet ouvrage permet de découvrir l’extraordinaire foisonnement des représentations cartographiques du canton du Valais, de Ptolémée aux cartes officielles actuelles. Il évoque également les principales conventions qui se sont cristallisées, et régissent le monde des cartes. Sans oublier l’univers de la toponymie et ses querelles locales, l’enseignement de la géographie à l’école qui a marqué bien des esprits, l’émergence de la carte touristique sous de multiples formes, les cartes liées à Tolkien et à la littérature ou encore celles de tous les projets rêvés et non réalisés. Avec, pour conclure, les créations des graphistes et des artistes.

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